Barrick suspend ses opérations au Mali : un bras de fer aux lourdes conséquences
- davidbriand2
- 15 juin
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Le géant canadien Barrick Gold a décidé de retirer son complexe aurifère de Loulo-Gounkoto, au Mali, de ses prévisions de production pour 2025. Cette décision marque un nouveau tournant dans un conflit de plus de deux ans avec le gouvernement malien, qui tente de revoir à la hausse les bénéfices tirés de l’exploitation minière sur son sol.
Une des plus grandes mines d’or en Afrique à l’arrêt
Depuis janvier 2025, les opérations de Loulo-Gounkoto — l’un des plus importants actifs africains de Barrick — sont suspendues. En cause : le blocage des exportations d’or par les autorités maliennes, la détention de certains employés, et la saisie de trois tonnes de stock dans un contexte de négociations tendues autour d’un nouveau contrat minier.
Selon l’agence Reuters, Barrick n’intègre plus les volumes maliens à ses objectifs de production 2025. Pourtant, le complexe de Loulo-Gounkoto devait générer environ 250 000 onces d’or, soit près de 14 % de la production mondiale de Barrick, selon les analystes de Morningstar et Jefferies.
Un différend aux enjeux économiques majeurs
L’enjeu est colossal : à l’heure où les prix de l’or atteignent des sommets historiques, les revenus potentiels de l’année pourraient dépasser le milliard de dollars. Pour le Mali, c’est une opportunité budgétaire précieuse ; pour Barrick, une perte sèche qui pourrait représenter 11 % de son EBITDA attendu en 2025.
Mais au-delà des chiffres, c’est la sécurité juridique et l’attractivité du secteur minier malien qui sont en jeu. Le gouvernement militaire, arrivé au pouvoir après les coups d’État de 2020 et 2021, souhaite que les futurs litiges soient réglés dans les tribunaux maliens, tandis que Barrick exige un arbitrage international.
Bras de fer judiciaire et diplomatique
La situation s’est complexifiée davantage avec une procédure lancée par l’État malien auprès d’un tribunal local pour nommer un administrateur provisoire — une décision qui priverait Barrick du contrôle de ses mines maliennes. En parallèle, l’entreprise canadienne a entamé une procédure d’arbitrage devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), une entité de la Banque mondiale. Mais sa tentative de suspendre les procédures judiciaires au Mali a récemment été rejetée.
Malgré les tensions, les négociations continuent. Un signe d’apaisement : Bamako aurait accepté que Barrick puisse rapatrier 20 % de ses revenus dans une banque étrangère — une concession inédite comparée aux autres entreprises minières opérant au Mali.
Un climat d’investissement fragilisé
Le bras de fer entre Barrick et le Mali s’inscrit dans une tendance plus large : plusieurs autres sociétés minières ont été contraintes de renégocier leurs contrats, parfois dans des conditions musclées. Le PDG du groupe australien Resolute avait même été détenu plus d’une semaine en 2023.
Alors que le Mali demeure le troisième producteur d’or d’Afrique, cette instabilité pourrait faire fuir les investisseurs, au moment même où le pays cherche à maximiser ses revenus tirés de ses ressources naturelles.